Mali : des militaires maliens et « étrangers » auraient exécuté 500 personnes en 2022 à Moura selon l’ONU

Gabon Matin

L’armée malienne et des combattants « étrangers » auraient exécuté en mars 2022 au moins 500 personnes lors d’une opération anti-djihadiste à Moura, dans le centre du pays, a indiqué vendredi le Bureau des droits de l’homme de l’ONU, relevant que de tels actes pourraient, selon les circonstances, constituer « des crimes contre l’humanité ».

Auteur : Gabon Matin
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Mali : des militaires maliens et « étrangers » auraient exécuté 500 personnes en 2022 à Moura selon l’ONU

L’armée malienne et des combattants « étrangers » auraient exécuté en mars 2022 au moins 500 personnes lors d’une opération anti-djihadiste à Moura, dans le centre du pays, a indiqué vendredi le Bureau des droits de l’homme de l’ONU, relevant que de tels actes pourraient, selon les circonstances, constituer « des crimes contre l’humanité ».

« Un rapport d’une mission d’établissement des faits du Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a conclu qu’il y a de fortes indications que plus de 500 personnes aient été tuées – la grande majorité sommairement exécutés – par les troupes maliennes et du personnel militaire étranger au cours d’une opération militaire de cinq jours dans le village de Moura, dans la région de Mopti, au centre du Mali, en mars 2022 », a détaillé dans un communiqué le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme.

Selon ce document, la plupart de ces personnes ont été « sommairement exécutées ». « Ces conclusions sont extrêmement inquiétantes », a déclaré dans un communiqué, Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

Ces actes constituent des crimes de guerre et pourraient constituer des crimes contre l’humanité

Moura est réputé être un fief de la Katiba Macina affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lui-même affilié à Al-Qaïda. L’opération – décrite par les autorités comme une opération militaire antiterroriste contre la Katiba Macina – a débuté le 27 mars 2022, jour de marché hebdomadaire très fréquenté à Moura.

Selon des témoins, un hélicoptère militaire a survolé le village en ouvrant le feu sur la population, tandis que quatre autres hélicoptères ont atterri et que des troupes ont débarqué. Les soldats ont encerclé les gens dans le centre du village, tirant au hasard sur ceux qui tentaient de s’échapper.

Certains militants de la Katiba Macina présents dans la foule ont riposté aux tirs des troupes. Au moins 20 civils et une douzaine de membres présumés de la Katiba Macina ont été tués. Puis, au cours des quatre jours suivants, au moins 500 personnes auraient été sommairement exécutées, selon le rapport.

L’équipe de la mission d’établissement des faits a obtenu de nombreuses données d’identification personnelle, y compris les noms d’au moins 238 de ces victimes. «  Les exécutions sommaires, les viols et la torture pendant les conflits armés constituent des crimes de guerre et pourraient, selon les circonstances, constituer des crimes contre l’humanité », a ajouté M. Türk.

Une enquête de plusieurs mois

L’enquête a été menée pendant plusieurs mois par le personnel de l’ONU au Mali auprès de victimes et de témoins. Elle a rassemblé des indications médico-légales et satellitaires. Les autorités maliennes ont refusé les demandes d’accès au village de Moura.

Selon les services du Haut-Commissaire Türk, Bamako a annoncé l’ouverture d’une enquête peu après l’attaque. Mais plus d’un an plus tard et dans l’attente des conclusions finales de l’enquête, les autorités maliennes continuent de nier tout acte répréhensible de la part de leurs forces armées.

Volker Türk a souligné que les enquêtes sur des rapports aussi graves de violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire doivent être menées de manière indépendante, impartiale et transparente, afin que les responsables rendent compte de leurs actes.

« Il est essentiel que les autorités maliennes prennent toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les forces maliennes engagées dans des opérations militaires et de maintien de l’ordre, y compris le personnel militaire étranger sous leur commandement ou leur contrôle, respectent pleinement les règles du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme  », a insisté le chef des droits de l’homme de l’ONU.

Des « hommes blancs armés » parlant une langue inconnue aux côtés des forces maliennes

Le rapport n’identifie pas explicitement les « étrangers  », mais l’ONU rapporte des témoignages recueillis par ses enquêteurs et décrivant ces étrangers comme des hommes blancs en treillis parlant une langue « inconnue  ».

D’après les témoins, les troupes maliennes entraient et sortaient quotidiennement de Moura, mais le personnel étranger y était resté pendant toute la durée de l’opération. Le jour suivant l’assaut, les soldats ont commencé à aller de maison en maison à la recherche de « terroristes présumés  ».

Les soldats maliens et leurs alliés « auraient sélectionné plusieurs personnes qui ont été sommairement exécutées pendant au moins quatre jours », dit le rapport. Les hommes à exécuter auraient été choisis sur des signes les rendant suspects comme le port d’une longue barbe.

« Des témoins ont indiqué à l’équipe onusienne qu’un groupe d’hommes rassemblés au sud-est du village avait été emmené par des soldats, puis abattu d’une balle dans la tête, le dos ou la poitrine, et que leurs corps avaient été jetés dans une fosse  », a détaillé le rapport ajoutant que « les victimes auraient été inhumées dans des fosses communes ».

Par ailleurs, le Haut-commissariat a aussi « des motifs raisonnables de croire que 58 femmes et jeunes filles ont été victimes de viol et autres formes de violences sexuelles  ».

Le rapport fait également état d’actes de torture sur des personnes arrêtées, lors des interrogatoires et pendant leur détention à Moura, Sévaré, ainsi qu’à l’Agence Nationale de la Sécurité d’État (ANSE) dans la capitale Bamako. A ce sujet, une victime a raconté comment des soldats l’ont emmené dans les locaux de la sécurité de l’État où elle a été interrogée, torturée et électrocutée pendant des heures.

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